L'OEIL DU CERCLE N°128 - JEUDI 7 DÉCEMBRE 2023  
 
 
la fabrique du droit
Adoption de la loi sur le partage de la valeur
 

La loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, conclu en février 2023, a été définitivement adoptée. Cet accord vise à mieux associer les salariés aux performances des entreprises, notamment dans les PME. Les entreprises de moins de 50 salariés pourront mettre en place à titre volontaire un dispositif de participation de branche ou d’entreprise pouvant être moins favorable que la formule légale. D’ici le 30 juin 2024, les branches professionnelles devront ouvrir une négociation en ce sens. Actuellement, les accords de participation dérogatoires doivent garantir des avantages au moins équivalents à la formule légale. A partir du 1er janvier 2025, les entreprises de 11 à 49 salariés devront mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur dès lors qu’elles font état d’un bénéfice net fiscal d’au moins 1% de leur chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs: participation, intéressement, plan d’épargne salariale, ou une prime de partage de la valeur. Le mécanisme de redistribution des bénéfices de l’entreprise aux salariés est déjà obligatoire dans les entreprises de 50 salariés ou plus. Ces dispositions seront mises en place à titre expérimental pour 5 ans à compter du 1er janvier 2025.

 
Des volontés européenne et nationale de simplification des normes pour les PME
 

Au niveau national, les grandes entreprises et les ETI doivent se préparer, pour la nouvelle année, à l’entrée en vigueur de textes ayant trait à leur fiscalité et responsabilité sociale et environnementale. Mi-novembre, le gouvernement a débuté les « Rencontres de la simplification », consultation publique à destination des chefs d’entreprises et entrepreneurs invités à partager leurs propositions pour faciliter les démarches administratives des entreprises et leur compréhension des normes. Les résultats des consultations seront rendus publics au mois de janvier 2024. Ces propositions alimenteront le projet de loi Pacte II que le ministre de l’Economie souhaite présenter début 2024. Au niveau de l’UE, la CSRD (corporate sustainability reporting directive) vise à mettre en place dès 2024 un reporting pour mieux encadrer la publication des informations extra-financières et imposer une plus grande transparence de la part des entreprises sur leurs activités et les conséquences de ces dernières sur l’environnement. La majorité des PME ne seront pas soumises aux obligations de reporting CSRD mais il leur est proposé de compléter volontairement une version simplifiée et allégée. La Commission a également présenté son programme de travail 2024, qui vise à alléger davantage la charge pesant sur les entreprises.

 
 
 
 
La vie des affaires et le droit
Intermarché discute avec Auchan pour créer une centrale d’achat
 

 Auchan et Intermarché veulent créer la première centrale d'achat française pour les produits alimentaires de grande consommation des grandes marques nationales ainsi que pourcertains produits non alimentaires. Les centrales d'achat renvoient à une diversité d'alliances qui peuvent prendre la forme d'accords de coopération, de contrats de mandat de négociation ou encore d'entreprises communes. Selon le communiqué commun des deux distributeurs, par ailleurs associés dans l’offre conjointe de rachat de l’intégralité des hypermarchés et des supermarchés Casino non encore cédés, ce projet a pour objectif de défendre au mieux les intérêts des consommateurs. Eu égard les enjeux posés par les centrales d’achat, il est probable que le projet de Intermarché et Auchan attise la curiosité de l’Autorité de la Concurrence.

 
 
 
 
Les juges font bouger les lignes
La Poste condamnée pour avoir manqué à son devoir de vigilance
 

Le tribunal judiciaire de Paris a donné raison au syndicat Sud PTT face au groupe La Poste. Il est reproché à ce dernier d’avoir manqué à son devoir de vigilance concernant l’exploitation de travailleurs sans-papiers par les sous-traitants de ses filiales. Pour le tribunal, La Poste n’a pas suffisamment détaillé sa cartographie des risques, et les risques eux-mêmes, qui doivent faire l’objet d’une identification, d’une analyse et d’une hiérarchisation. Il s’agit de la première décision au fond rendue par une juridiction faisant application du devoir de vigilance issu de la loi de 2017 qui oblige les grandes sociétés françaises à publier un plan de vigilance sur les risques humains et environnementaux de leurs activités, y compris au sein de leurs filiales, fournisseurs et sous-traitants. La Poste devra aussi compléter son plan par « un mécanisme d’alerte et de recueil des signalements après avoir procédé à une concertation des organisations syndicales représentatives » et « publier un réel dispositif de suivi des mesures de vigilance ». Le tribunal, « constatant que La Poste faisait preuve d’une démarche dynamique d’amélioration de son plan de vigilance chaque année », n’a toutefois pas assorti cette décision d’une astreinte financière.

 
Revirement sur les conditions de la reprise des actes conclus avant immatriculation
 

Le 29 novembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation a opéré un revirement marquant en matière de reprise des actes conclus avant l’immatriculation de la société. Elle abandonne, par 3 arrêts, sa jurisprudence selon laquelle seuls les engagements expressément souscrits « au nom » ou « pour le compte » d'une société en formation sont susceptibles d'être repris par la société après son immatriculation, les actes pris « par » la société en formation étant nuls. Il appartient désormais au juge d'apprécier souverainement si la commune intention des parties n'était pas que l'acte soit conclu au nom ou pour le compte de la société en formation.

 
 
 
 
Les acteurs du droit en mouvement
Mobilités : l’Autorité rend public son avis sur le fonctionnement concurrentiel du secteur des transports terrestres de personnes
 

Après avoir constaté que le secteur des transports terrestres de personnes avait fortement évolué ces dernières années, et que les transports ferroviaires conventionnés s’apprêtaient à s’ouvrir à la concurrence, l’Autorité de la concurrence avait annoncé le 19 décembre 2022 s’être autosaisie afin de se livrer à un exercice d’avis-bilan. Publié le 30 novembre, il liste les freins à plus de concurrence, notamment sur les marchés organisés par les collectivités locales. L’Autorité fait le bilan des « cars Macron », souligne la difficulté des autorités organisatrices pour faire émerger des alternatives à la SNCF et leur recours aux cabinets de conseil, constate que l’on peut difficilement mettre plus de trains sur un réseau vieillissant, ou encore, estime que le rythme est assez lent en matière d'ouverture du marché national.

 
 
 
 
le monde change ... digital
83 médias espagnols réclament 550 millions € à Méta pour concurrence déloyale
 

Par l'intermédiaire de l'Association des médias d'information (AMI), qui comprend des groupes tels que Prisa, Vocento ou Unidad Editorial, plus de 550 millions € sont réclamés à Meta pour concurrence déloyale. Elle accuse la société mère de Facebook et Instagram de vendre de la publicité ciblée avec des données obtenues sans autorisation entre mai 2018 et juillet 2023.  AMI affirme dans sa plainte que, grâce à l'utilisation des données personnelles des utilisateurs des plateformes Meta, ceux-ci auraient été suivis sans leur consentement. Cette utilisation aurait permis à l’entreprise de proposer la vente d’espaces publicitaires sur le marché en s’appuyant sur un avantage concurrentiel obtenu illégalement. L’association estime que la violation de la règlementation européenne sur la protection des données est systématique et massive et que l’intégralité des revenus provenant de la vente de publicité segmentée ont été obtenus illégalement.

 
JOP 2024 : l’ANSSI met à disposition un kit d'exercice cyber qui simule un contexte JO 2024
 

L’ANSSI livre désormais des kits d’exercice pour aider les organisations à se préparer à la gestion d’une crise d’origine cyber. L'agence met à disposition un kit « JOP massifié » spécifiquement construit pour implémenter un exercice simulant le contexte des Jeux Olympiques et Paralympiques. On trouve dans ce kit un tutoriel d'organisation d'un exercice cyber dans le cadre des jeux, qui a pour objectif de répondre à plusieurs enjeux : sensibiliser à la gestion de crise cyber, fournir une marche à suivre pour organiser un exercice, répondre aux questions que l'organisation d'un exercice pourrait susciter et fournir des modèles d'application. On y trouve également un document de présentation du scénario de crise cyber présentant différents schémas d'attaques plus ou moins complexes ainsi qu'un chronogramme et plusieurs exercices. Au total, les organisations peuvent donc choisir parmi 12 formats d’exercice.

 

 
Faute, amende administrative, calcul... La CJUE apporte des précisions sur l'application du RGPD
 

Saisie dans le cadre de deux questions préjudicielles, le 5 décembre, la Grande chambre de la CJUE a rendu deux décisions dans lesquelles elle a apporté des précisions sur l'application du RGPD sur deux notions : le calcul de l'amende administrative et l'intention dans le cas d'une violation. À quelles conditions des amendes administratives peuvent-elles être imposées aux responsables du traitement ou aux sous-traitants en cas de violation du RGPD ? Un élément de faute est-il requis pour pouvoir leur imposer de telles amendes ? Ou le RGPD permet-il d’imposer des amendes en l’absence de toute faute, sur le fondement d’un responsabilité objective ? Selon la CJUE, l’imposition d’une amende administrative présuppose nécessairement un comportement fautif, c’est-à-dire que la violation a été commise délibérément ou par négligence. En outre, un responsable du traitement des données peut se voir infliger une amende « pour des opérations effectuées par un sous-traitant, pour autant que ces opérations peuvent être imputées au responsable du traitement ». Le calcul de l’amende doit se fonder sur le chiffre d'affaires du groupe. Les amendes affecteront non seulement les États membres de l’UE, mais aussi les États ayant des filiales dans l’UE, qui sont dès lors sujettes à l’application du RGPD.

 
Loi C-18: Google versera 100 millions $ aux médias canadiens
 

Alors que la loi sur les nouvelles en ligne (loi C-18) entre en vigueur le 19 décembre, le gouvernement canadien a conclu une entente avec Google. Après plusieurs mois de négociations, le gouvernement fédéral canadien s’est finalement entendu avec Google sur le cadre réglementaire qui établira les redevances aux médias canadiens. L'entreprise s'engage à verser 100 millions $ par an aux médias canadiens. La loi sur l’information en ligne oblige les géants de la technologie à conclure des accords avec les médias pour les rémunérer pour le contenu d’actualité qui apparaît sur leurs sites, si ce contenu contribue aux revenus générés. De son côté, Meta refuse toujours de se plier à la loi C-18. La question de la répartition des 100 millions $ demeure une source d’inquiétudes pour les petits journaux.

 
La Commission UE lance une nouvelle base de données pour suivre les conditions générales applicables aux services numériques
 

La nouvelle base de données présente les conditions générales des services numériques, en mettant l’accent sur les plateformes en ligne telles que les médias sociaux, les boutiques d’applications ou les places de marché. Cette base de données est une initiative de la Commission, qui complète les différentes exigences de transparence introduites par la loi sur les services numériques (DSA), y compris l'obligation pour les plateformes en ligne de fournir un résumé facilement compréhensible et clair de leurs conditions générales, dans les langues des États membres dans lesquels elles opèrent. Le DSA donne également mandat à la Commission de maintenir un Base de données de transparence, qui comprend des motivations détaillant les informations que les plateformes doivent fournir aux

 
 
 
 
Out of the law box
Le boléro cubain ou mexicain, un genre musical désormais inscrit au patrimoine immatériel de l’humanité de l’UNESCO
 

L’UNESCO a inscrit le boléro dans sa liste du patrimoine immatériel lors de sa session 2023. Le boléro est un genre musical à part entière dans la chanson sentimentale d’Amérique latine, au caractère lyrique fort. Ce genre musical importé par les colons espagnols au XIXe siècle marque l’identité culturelle de Cuba et du Mexique où il s’est développé. Mélange culturel, il associe la langue utilisée dans la poésie européenne, les rythmes africains des esclaves et les sentiments des peuples autochtones des Amériques où les colons espagnols l’ont apportés au XIXe siècle.

 
 
 
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