L'OEIL DU CERCLE N°126 - JEUDI 23 NOVEMBRE 2023  
 
 
La fabrique du droit
Avis sur un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne
 

Le Gouvernement a rendu public l'avis du Conseil d'État sur un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne portant sur l’économie, les finances, la transition écologique, le droit pénal, le droit social et le domaine agricole. Quelques précisions sont apportées concernant, notamment : les dépositaires centraux de titres, les paiements transfrontaliers dans l’Union, l’assistance internationale au recouvrement, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, le système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre…

 
 
 
 
La vie des affaires et le droit
Lait contaminé : Lactalis réclame 1 milliard € au laboratoire Eurofins, qui contre attaque
 

Lactalis a déposé fin mars une assignation au tribunal de commerce de Paris visant deux filiales du laboratoire Eurofins et leurs assureurs. Lactalis réclame plus d'1 milliard € à Eurofins, estimant que le laboratoire n'a pas mené correctement ses analyses et est responsable du scandale de la contamination aux salmonelles de laits infantiles. Le laboratoire juge infondé le dédommagement réclamé par le géant mondial du lait et estime que les filiales des laboratoires d'analyse sont «responsables du dommage subi». Plusieurs dizaines de nourrissons avaient été atteints fin 2017 en France de salmonellose, des intoxications alimentaires qui peuvent s'avérer graves chez les plus faibles.

 
Yves Rocher en Turquie : 47 anciens salariés rejoignent l’action en justice
 

En 2022, Sherpa, ActionAid France, le syndicat turc Petrol-Iş ainsi que 34 anciens salariés d’une filiale turque du Groupe Yves Rocher assignaient l’entreprise cosmétique devant le Tribunal Judiciaire de Paris. Depuis, 47 nouvelles personnes ont rejoint l’action en justice. Elles reprochent à l’entreprise d’avoir manqué à ses obligations issues de la loi sur le devoir de vigilance des sociétés-mères, en matière de liberté syndicale et de droits fondamentaux des travailleurs dans sa filiale en Turquie. Le 27 mars 2017, la loi sur le devoir de vigilance a été promulguée afin d’imposer aux grandes entreprises françaises une obligation de vigilance et les contraindre à répondre devant la justice française des violations aux droits humains et des atteintes graves à l’environnement résultant des activités de leurs filiales, fournisseurs et sous-traitants à travers le monde.

 
 
 
 
Les juges font bouger les lignes
Legal privilege : le Conseil constitutionnel censure le cavalier législatif de la loi Justice
 

La confidentialité des avis juridiques en entreprise prévue dans le cadre de la loi Justice était sur la bonne voie. Le Conseil constitutionnel en a malheureusement décidé autrement. Les Sages censurent comme « cavalier législatif », après avoir soulevé cette question d’office, la consécration du legal privilege. Le juge constitutionnel relève ainsi que la disposition censurée a été introduite par amendement dans la loi ordinaire déférée. Le juge constitutionnel souhaite que l’introduction de la confidentialité des consultations juridiques réalisées par les juristes d’entreprise soit redébattue par les députés et les sénateurs. Les DJ du Cercle Montesquieu restent engagés dans la défense de la confidentialité, essentielle à l'intégrité et à l'efficacité de notre système juridique.

 
Action en contrefaçon de droit d’auteur et point de départ de la prescription en présence d’un délit continu
 

Les actions civiles en contrefaçon de droit d’auteur sont soumises à la prescription quinquennale de l’article 2224 du Code civil dont le point de départ est le jour où le titulaire a eu connaissance de la contrefaçon, même si celle-ci s'inscrit dans la durée. Il s’agissait ici, pour la Cour, de se prononcer sur la question de la prescription d’une action en contrefaçon de droit d’auteur en présence d’un délit continu. Elle ajoute que le délai de prescription commence à courir à la date à laquelle a été admis le caractère contrefaisant d’une œuvre.

 
 
 
 
le monde change ... digital
La Commission UE accusée de violer le RGPD dans le cadre d'une campagne micro ciblée sur X
 

L'association autrichienne Noyb , spécialisée dans la protection des données et de la vie privée, a déposé une plainte auprès du Contrôleur européen de la protection des données contre la Commission européenne. Elle reproche à la direction générale des migrations et des affaires intérieures de la Commission d'avoir enfreint sur X (Twitter) les règles du RGPD lors d'une campagne ciblée menée sur les réseaux sociaux en septembre 2023 pour promouvoir un projet de règlement visant à scanner les services de messagerie à la recherche de matériels pédopornographiques. Noyb indique également qu’elle envisage de déposer une plainte contre X pour avoir fourni des outils permettant au personnel de l'UE de cibler des publicités en utilisant des catégories liées aux opinions politiques et aux croyances religieuses. Pour leur traitement, ces catégories sensibles de données personnelles nécessitent de recueillir le consentement explicite des personnes concernées. L'utilisation de données personnelles sensibles à des fins de ciblage publicitaire est également interdite en vertu du Digital Services Act (DSA).

 
DMA : Meta et TikTok et Apple saisissent la justice européenne
 

La CJUE a confirmé qu’Apple contestait le statut de « contrôleur d’accès » donné par la Commission UE, au nom du Digital Markets Act (DMA). De leur côté, Meta, la maison-mère de Facebook, et TikTok, filiale du groupe chinois ByteDance, ont officiellement saisi le Tribunal de l’Union européenne, sur les mêmes fondements. Meta refuse l’inclusion de Messenger et de sa Marketplace dans la liste des « gatekeepers ». Apple souhaite retirer son App Store. ByteDance affirme réaliser moins de 7,5 milliards € de chiffre d’affaires dans l’Union européenne, ce qui devrait exclure TikTok du dispositif. Le DMA va imposer des obligations drastiques à 22 services numériques, appartenant à 6 géants du numérique, définis comme « gatekeepers », afin d’éviter qu’ils n’abusent de cette position. La Commission européenne a précisé sa liste des « contrôleurs d’accès » le 6 septembre 2023. Ces « gatekeepers » désignés ont jusqu’au 6 mars 2024 pour se mettre en conformité avec le DMA et avaient jusqu’au 16 novembre 2023 pour contester devant la justice européenne leur présence au sein de la liste.  Le 15 novembre, Alphabet et Microsoft ont indiqué qu’ils acceptaient la classification ainsi établie.

 
Cryptomonnaies et Blanchiment : Binance va payer 4,3 milliards $ d’amende aux Etats-Unis, son dirigeant démissionne
 

Le leader mondial des plateformes de trading crypto Binance s'est entendu avec la justice américaine pour mettre fin aux poursuites des autorités financières. En 2018, le département américain de la Justice avait ouvert une enquête contre la plateforme. Depuis, la plus grande bourse d’échange de cryptomonnaies a plaidé coupable de violation des lois américaines contre le blanchiment. Les deux principales agences de régulation des marchés financiers, la SEC et la CFTC, reprochent à l’entreprise de ne pas avoir pris des mesures suffisantes pour empêcher le blanchiment. Les clients pouvaient notamment accéder à la plateforme sans que leur identité n’ait été préalablement vérifiée. Selon les enquêtes de multiples transactions ont été réalisées par des réseaux terroristes et criminels. Pour mettre fin aux poursuites, Binance a accepté de verser deux amendes de 3,4 milliards $ et 968 millions $ aux deux agences qui dépendent du Trésor américain. Après que des procureurs fédéraux aient formulé des accusations criminelles liées au blanchiment d'argent et à la violation des sanctions financières internationales, le directeur général, actionnaire majoritaire et cofondateur de Binance, Changpeng Zhao, a démissionné de ses fonctions et plaidé coupable. Changpeng Zhao va verser à titre personnel une amende de 50 millions $.

 
Transparence des modèles d'IA générative : plus de 80 organisations professionnelles représentant les industries culturelles, interpellent le gouvernement
 

Plus de 80 organisations de la musique, du cinéma, de l'édition et de la presse signent une lettre ouverte et collective pour rappeler l’urgence et l’importance fondamentale d’avoir une transparence des systèmes d’IA. Ses auteurs estiment que seul le principe intangible d'une transparence sur les données d'entraînement et sur les contenus générés pourra apporter des garanties aux citoyens et aux créateurs sur le respect de leurs droits. Cet appel intervient alors que le règlement sur l'intelligence artificielle (AI Act) est en discussion et qu'une disposition sur la transparence des sources des « modèles de fondation » fait débat entre les Etats membres.

 
US : Le groupe de pirates BlackCat dépose plainte  contre l’une de leurs victimes auprès de la SEC
 

Le groupe de ransomwares ALPHV/BlackCat a déposé une plainte  aux US auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC) contre l'éditeur de logiciels MeridianLink. Depuis le 5 septembre 2023, la SEC exige que les entreprises publiques divulguent dans les quatre jours toutes les failles de cybersécurité subies. Le groupe de cybercriminels accuse MeridianLink d’avoir dissimulé à ses clients une cyberattaque, réalisée par ses soins, au-delà des délais légaux. La pliante a été diffusée sur le site darknet.

 
Les géants du numérique tardent à payer leurs amendes
 

L’Australie a confirmé que X n’avait pas payé l’amende imposée pour avoir omis de présenter son intention de supprimer des contenus décrivant des abus sexuels sur mineurs. Mais le phénomène est mondial : des milliards d’euros demeurent en attente de paiement ou subissent des conditions de séquestre en vue de l’issue de procédures judiciaires.  Par ici, un petit état de la situation.

 
 
 
 
GREEN DEAL
Au Brésil, trois projets de compensation de carbone accusés de « frauder »
 

La compensation carbone consiste à essayer de contrebalancer ses propres émissions de CO2 par le financement de projets de réduction d'autres émissions ou de séquestration de carbone. Pour compenser leurs émissions de CO2, des multinationales dont Air France, avaient acheté des crédits-carbone censés financer la protection de la forêt à Portel, dans l’Etat du Para au Brésil. En 2019, Air France communiquait sur sa participation à des accords de compensation volontaire des émissions de carbone. Air France et KLM proposaient à leurs clients lors du processus de réservation d’un billet, de compenser leurs émissions de CO2 de façon volontaire au travers de programmes de compensation. Problème : les émissions des entreprises n’ont pas été compensées, les crédits annoncés n’ont pas de base réelle et les projets sont accusés de fraude. En plus de faire face à la fraude décelée, Air France et 17 autres compagnies aériennes sont accusées depuis juin 2023 devant la Commission européenne, par l’association UFC-Que Choisir ainsi qu’à 20 autres associations d’avoir recours à des pratiques commerciales trompeuses ainsi qu’à du greenwashing. En 2021, le Sénat étudiait l'utilisation de la notion de compensation Carbonne auprès des consommateurs. Le recours à ces crédits et compensations carbone par les entreprises est critiqué par plusieurs associations, qui alertent sur le fait qu’ils ne peuvent pas se substituer aux réductions directes des émissions de gaz à effet de serre.

 
 
 
 
Out of the law box
La grande vente spéciale Super Noël revient chez Emmaüs Défi
 

A partir du 2 décembre, à Paris, au sein des boutiques de Riquet et du 104, vous pourrez comme une membre de la Rédaction de l’Œil, donner de votre temps en tant que bénévole ou prendre rendez-vous pour trouver des cadeaux écoresponsables et solidaires.

 
 
 
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